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Interview BluesGraceNight
Le vendredi 30 novembre dernier, nous sommes allées à la rencontre de l’artiste ayant réalisé l’illustration de notre prochain panier en vente jusqu’au 20 décembre sur kilti.org.
Cette artiste comédienne de 32 ans, touche-à-tout comme Leonard De Vinci dont est clairement inspiré ce dessin BluesGraceNight, se dévoile…
Que signifie BluesgraceNight ? Qui es-tu et quel est ton parcours ?
Ma véritable identité est Emmanuelle Delplace, mais personne ne me connaît sous ce nom à part l’administration française (rire), depuis mes 10 ans, on m’appelle Manue.
Depuis 2011, je collectionne des magnets, ceux qu’on met d’habitude sur son frigo, et il me plaisait de les assembler pour faire de la poésie, BluesGraceNight est venu à ce moment.
Cela tombait bien car je suis assez fan de Grace Kelly. Je trouvais que ça allait bien également avec mes influences mélancoliques, mon rapport à la nostalgie.
Je suis née dans le Nord, j’ai fait une partie de mes classes entre la Normandie et ici, dont 5 ans d’Art Dramatique au conservatoire de musique de Douai tout en faisant mes études.
Etudes en Arts et Culture d’abord mais ça m’a très vite saoulé, et comme j’étais partie un an vivre en Arizona, et que mes parents me lançaient le fameux «Si tu veux être comédienne, tu dois assurer tes arrières ! », j’ai donc bifurqué sur une licence d’anglais.
Comment en es-tu venue à l’art ?
A la base je suis donc comédienne de théâtre, mais c’est très vite parti dans tous les sens (rire). Avec une amie, Audrey, on a créé notre compagnie de théâtre en 2011, Les Dissolvantes.
Avec cette compagnie, on a monté un spectacle engagé féministe autour d’un panel de textes de Simone de Beauvoir ou encore Virginia Woolf avec une dose de Véronique Sanson, « Reset », nous l’avons créée à deux, écriture, mise en scène.
Nous avons ensuite monté un second spectacle avec une grosse équipe, une histoire que j’avais écrite, mais qui ne s’est finalement pas concrétisée. Les aléas de la création artistique !
En revanche, la compagnie a réalisé de nombreux partenariats et a participé à de nombreux projets comme par exemple des ateliers réalisés avec la faculté de médecine (simulation de crise d’agitation aiguë pour préparer les étudiants à leurs futures gardes aux urgences), des ateliers de prise de parole et confiance en soi pour les étudiants avec l’Atelier Culture La Piscine à Dunkerque, ou bien un travail d’écriture et mise en voix avec une classe de 5e à Lillers, avec la Ligue de l’Enseignement.
J’ai également bossé avec Antoine Lemaire de la Compagnie THEC, lorsqu’il était metteur en scène associé à la Rose des Vents, sur toute la création de sa saga « Faustine ». Entretemps, j’ai commencé à faire quelques voix-off en anglais et en français pour des potes et c’est finalement devenu l’une de mes activités principales en tant que comédienne. J’ai la chance de collaborer avec plusieurs boîtes de production audiovisuelle de la région sur des projets aussi divers qu’enrichissants.
Mais finalement quel est ton support de travail de prédilection ? On a pu voir annoncé que tu chantais également ?
Hum, chanter, c’est un bien grand mot, mais en effet, je prête ma voix régulièrement pour des projets. L’été dernier, j’ai fait la voix off pour un documentaire sur la scène punk-hardcore à Uméa en Suède, qui s’appelle UxÅ. Même si je n’en n’écoute pas moi-même (rire), ce projet m’a beaucoup plu et j’aimerais en faire d’autres, c’était un projet de potes d’enfance à la base, une bande d’amis originaires de Tours, j’aime travailler avec des gens passionnés.
Et c’est aussi ce qui m’a rapproché de Romain de la Cave aux Poètes et qui a créé le collectif « Bruit Blanc » dont je fais partie. Mathieu, du groupe Chamberlain en fait également partie et Romain m’a proposé d’enregistrer la voix sur l’une des chansons du projet solo de Mathieu : Cendrars. J’ai écrit le texte sur la mélodie de Mathieu « One Bay », on s’est enregistré le temps d’une après-midi un peu expérimentale, ça s’est super bien passé et j’espère qu’il y aura d’autres projets de ce type.
Et la gravure dans tout ça ? Parle-nous des « autoquotes » ?
Tout a commencé comme BluesGraceNight, avec mes magnets, je composais des petites phrases avec lesquelles je remplissais quantité de carnets. « Autoquote » ce sont des citations avec mes propres mots. C’est un projet qui se rapproche du travail du Tampographe Sardon et de Violente Viande (sur Instagram) dans son côté irrévérencieux et cash.
Au moment où j’ai réalisé « Le timing cette petite pute », ça parlait tellement que mes proches m’ont demandé comment l’avoir chez eux… J’ai essayé différentes techniques comme le pochoir à la main sur tote bag mais je ne m’imaginais pas faire de la sérigraphie, trop compliqué toute seule et sans expérience !
La personne avec qui j’étais à ce moment faisait de la gravure et nous en avons parlé. Ma mère qui fait de la peinture, avait également participé à un atelier de gravure et c’est donc avec elle que j’ai commencé mes premières gravures dont « Le timing cette petite pute », c’était en juillet 2017. C’était d’ailleurs assez improbable de faire ça avec elle, souvent elle me dit « Manue, qu’est-ce que t’es vulgaire ! » (rire)
Depuis, j’ai continué à améliorer la technique, j’ai acheté mon propre matériel. J’ai commencé avec de la gravure sur lino, grosse plaque de lino assez friable, tissée sur l’arrière et je grave avec des gouges de différentes lames et largeurs. En suivant des comptes de professionnels sur Instagram, j’ai découvert la gomme, et mes plus petites gravures sont donc faites sur de la gomme.
C’est vraiment du DIY, et c’est assumé, je n’ai pas la prétention de le faire professionnellement, mes prints ont tous des petits défauts et j’essaie beaucoup de choses pour comprendre la technique, à ma manière. Je fais des tests, des fois c’est moche, des fois ça va (rire). Mon métier reste comédienne et la linogravure m’occupe les jours où je suis off.
Tu nous fais la joie d’illustrer notre prochain sac sur le thème Bougeons-nous, explique-nous un peu ce dessin ?
A la base, je ne suis pas illustratrice, je galère, franchement (rire) mais le thème me parlait…La question de l’identité et de l’identité de genre notamment me parle beaucoup sans être forcément investie dans des associations. J’ai souvent l’occasion d’aller à Montréal et je vois la différence avec la France, cela m’interpelle à chaque fois de voir à quel point les gens là-bas sont libres, ils sont eux-mêmes, ce qu’ils ont envie d’être et n’ont pas de craintes d’être jugés. J’admire cette liberté et je pense que nous devrions tendre vers ça ici aussi. Le dessin s’est goupillé avec un projet de street-art que j’ai monté avec des copines pour promouvoir une plus grande liberté des femmes dans l’espace public et il y avait donc une corrélation, je ne pouvais pas rentrer en France, et ne rien faire !
Mon dessin « Le trans de Vitruve », parce que c’est comme ça que je l’ai appelé (rire), que j’ai fait en un jet, me semblait le plus évident, et je suis contente qu’il ait été retenu !
Aujourd’hui, et demain en 2019, pour quoi et comment (te) bouges-tu ?
Jusqu’à présent mon implication se faisait au travers d’initiatives personnelles. J’ai ce grand questionnement en ce moment comme beaucoup de personnes je pense… j’ai participé à la marche « Nous Toutes », il y a les marches pour le climat aussi, au niveau de l’écologie… A côté je fais juste des petites choses au quotidien, j’essaie d’avoir une conscience éclairée. J’ai envie de m’investir un peu plus pour les gens qui vivent dans la rue (l’idée du calendrier inversé) il y a aussi l’association à Moulins, « Chez Violette », je commence à me renseigner là-dessus…
A côté de ça je suis féministe, et ne suis pas frileuse de le dire, le jour où tout le monde sera féministe convaincu, alors on pourra se dire véritablement humaniste… Je rencontre des hommes qui trouvent que ce n’est pas un combat si important, mais je suis aussi entourée d’hommes qui, comme mon frère et mes amis, sont investis et cherchent à ce que les mentalités évoluent. Les hommes version 2.0 !
Comment s’est enclenchée cette collaboration avec Kilti ?
C’est Romain de la Cave aux poètes qui m’a mis en relation avec Laudine parce que je faisais déjà quelques visuels pour « Bruit Blanc » et on a abordé la collab en fin septembre. C’était assez flou à l’époque mais voir la date arriver ça me fait plaisir, j’ai hâte !
Pour finir quels sont tes projets et expositions à venir ?
Celle qui aura lieu lors de la soirée de distribution des paniers culturels de janvier, puis, en février 2019 j’ai une exposition au Café Diskaire !
Ah et pour les Parisiens vous pouvez passer commande et on se retrouve entre le 20 et le 22 décembre à Paris !
Informations pratiques :
Les commandes pour des prints se font exclusivement sur mon facebook BluesGraceNight (https://www.facebook.com/BluesGraceNight/) !